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Rendre visible agilité et performance environnementale des « Smart Building »
Le bâtiment intelligent s’annonce plus sûr, plus confortable, plus écoresponsable. C’est un bâtiment au service de l’usager. Les besoins de l’usager sont directement pris en compte, sans l’intervention d’une fonction de supervision. Mais les capacités d’un bâtiment sont cachées. L’intelligence du bâtiment n’est pas un signe visible de l’extérieur.
Rendre visible la performance intrinsèque du bâtiment
Pour les investisseurs d’une promotion immobilière, l’investissement dans cette agilité du bâtiment doit apporter un retour quantifiable, dès la mise sur le marché. Les labels et certification visent à répondre à ce besoin. Bienvenue dans un monde d’acronymes, car les labels du bâtiment portant sur l’énergie ou le numérique pullulent : Effinergie, BBC, BBCA, HPE, E+C-, HQE, LEED, BREEAM, WBS, WiredScore, SGR, R2S, SRI… où la même lettre n’a pas toujours la même signification.
Pour être rigoureux, il est utile de mentionner que ces acronymes mêlent aussi deux notions, certification et labellisation. La certification, toujours encadrée par la loi dépend d’un règlement mis au point par un organisme certificateur. Le label garantit un certain niveau de qualité répondant aux règles définies par le cahier des charges du créateur du label. Le label n’est pas obligatoire.
Côté certifications, la certification française HQE (haute qualité environnementale) cible l’impact d’un bâtiment sur l’environnement, autour de 4 grands thèmes : écoconstruction, confort, santé et écogestion. Similaire, la certification BREEAM est d’origine britannique. D’origine américaine, la certification LEED qui s’attache à l’efficacité énergétique, ou la certification Well Building standard au bien être des occupants des bureaux.
Côté labels, BBC pour Bâtiment Basse Consommation a ouvert la voie, HPE monte le niveau d’exigence sur le même domaine, quand BBCA – ou label bas carbone, valorise comme son nom l’indique la démarche bas carbone, par exemple des matériaux utilisés à la construction.
Un même bâtiment peut tout à fait obtenir plusieurs certifications et labels.
Cette précision faite, nous pouvons fusionner les deux démarches. Et convenons-en, la première leçon c’est que cela ne sert pas le premier objectif : éclairer l’usager ! Car il faut maitriser le cahier des charges derrière chacun des acronymes pour comprendre la signification réelle du niveau affiché. Une affaire de spécialistes.
La certification Environnementale des bâtiments met l’accent sur la performance du bâtiment mais manque la cible de la compréhension par l’usager. Elle en pâtit et reste un sujet d’expert.
Communiquer la performance intrinsèque du bâtiment :
L’utilisateur est aujourd’hui habitué à être informé simplement. C’est d’ailleurs le moteur des subventions de l’ADEME : le produit subventionné dispose soit d’un ECOLABEL européen, soit affiche une note environnementale – les fameuses lettres A à E avec les barres colorées.
Le bâtiment est un assemblage d’écosystèmes complexes (bati, isolation, chauffage, climatisation, contrôle d’accès, transport vertical…). Afficher à la fois la performance « smart » et le respect de la composante environnementale permettrait de résoudre un certain nombre de difficultés :
- Il est difficile pour l’acheteur de s’y retrouver dans les promesses commerciales. D’autant plus quand le sujet est innovant et difficile à circonscrire.
- L’intelligence du bâtiment est une notion protéiforme, qui s’adresse à la performance produite par un ensemble d’éléments aussi divers que :
- Les matériaux mis en œuvre, la conception architecturale, les partis pris technologiques, les équipements installés…
- Mais aussi toutes les possibilités d’interactions entre les différents écosystèmes : Chauffage, climatisation, transport vertical, contrôle d’accès, lumière, circulation d’eau ... etc… - L’irruption de l’internet des objets, y compris dans le bâtiment porte le risque d’une dérive numérique irresponsable – par exemple par la multiplication d’applicatifs isolés, fonctionnant en silo.
Le label peut permettre de dépasser tout ou partie des silos et de promouvoir une vision d’ensemble intégrant les thèmes gouvernementaux (Stratégie nationale bas carbone, Programmation pluriannuelle de l’énergie, loi relative à l’économie circulaire, plan biodiversité, plan national d’adaptation au changement climatique, plan national santé environnement…) . Le label est force de proposition, en amont du cadre législatif. Les parties s’associent de façon volontaire pour établir le cadre de référence.
Dans la pratique, les travaux sont menés par des entités partageant des approches communes des thèmes gouvernementaux : génie climatique ; génie électrique ; informatique et télécommunication. Cela explique sans doute la variété de labels que nous observons sur le marché. Prenons garde de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Il serait dommageable de prendre un raccourci hâtif et de mettre en avant cette complexité pour faire croire à l’inutilité. Bien au contraire, chaque label contribue à partager la vision d’ensemble.
A terme, le label et les dispositifs d’incitation associés pourraient devenir un outil de progrès collectif permettant une vision dé-silotée de la manière de construire et d’opérer le bâtiment intelligent.
Valoriser la performance du bâtiment
Si le label permet de mieux cerner la performance du bâtiment, le promoteur qui va prendre l’initiative de viser un niveau de label pour son bâtiment en attend une valorisation financière.
Il est alors légitime de se poser la question de la valorisation financière des labels.
- Toute chose égale par ailleurs, quelle différence de prix avec ou sans tel label ?
- Le marché reflète-t-il l'engouement supposé des uns et des autres pour la technologie et la sobriété environnementale ?
Il y a trop de labels possibles et trop peu d'opérations labellisées dans le monde pour répondre factuellement à ces deux questions.
J’observe pour ma part que quelques labels sont des labels "commerciaux", créés par des startups dont le business model est justement cette valorisation de l’opération immobilière. Dans ce cas, le label porte le risque de chercher à travailler d'abord la communication que la performance réelle de l'asset bâtiment. J’observe aussi que des opérations visant les labels les plus récents changent de main plusieurs fois avant la commercialisation - ce qui laisse penser que chaque promoteur a fait successivement une plus-value.
Nous pouvons nous contenter de ce qualitatif qui laisse penser que ça marche. Le sujet est d’actualité. Ainsi UK, DEU et CH ont une approche fort différente du sujet de la "donnée" dans le bâtiment intelligent.
En France, les parties cherchent à comprendre comment améliorer opérationnellement le bâtiment. Comment les données disponibles peuvent-elles rendre le bâtiment Serviciel? Le Big Data est alors utilisé pour optimiser des fonctionnalités ou redéfinir des business models opérationnels. Les labels aident à rendre ces démarches possibles, par exemple en prônant l'interopérabilité.
L'approche Anglo-Saxone porte sur des analyses financières. Le Big data est utilisé pour corréler les drivers de l'intelligence du bâtiment qui présente le plus de potentiel de "profit" au niveau du promoteur. Les labels sont alors un des éléments de l'analyse.
Une place pour l’ingénieur, un rôle pour le consultant
Sur le marché français, plusieurs labels aident à appréhender l’intelligence du bâtiment. Les premiers labels sont apparus en 2018. Ils sont très jeunes et manquent encore de visibilité, même s’ils le méritent.
Applicable dès la naissance du projet, ils soutiennent toute la phase exploitation du bâtiment. Ils pavent le chemin vers ce « fameux » bâtiment intelligent, plus sûr, plus confortable, plus écoresponsable POUR L’USAGER !
Si la recherche d’une labélisation est d’abord l’initiative du maitre d’ouvrage, pour valoriser sa réalisation et capitaliser sur toute la valeur ajoutée potentielle, cette labélisation DOIT témoigner de la réalité et non pas être un coup de tampon sur une brochure. N’est-ce pas la place de l’ingénieur que de faire en sorte que le label garantisse la performance, et au-delà, parle à l’usager. Il reste du travail pour y parvenir. Le sujet du label du bâtiment intelligent est protéiforme et tiré par les urgences du moment comme la RE 2020. Nous sommes tous d’accord qu’il faut partir des cas d’usage pour évaluer le bâtiment et les cadres de référence SGR ou R2S en sont directement issus. Malgré cela, la prise en compte des performances servicielles reste embryonnaire.
Pour que l’usager en comprenne le bénéfice et devienne « consommacteur », il faut faire grandir le label au-delà de la seule valorisation des transactions immobilières.
L’intelligence du bâtiment augmente avec sa capacité :
- A s’interconnecter avec d’autres écosystèmes.
- A traiter efficacement les données issues de ces différents écosystèmes.
- A donner le pilotage à l’usager.
- Tout en restant numériquement frugal.
Il est possible de faire du bâtiment intelligent une réalité en progressant pas à pas – dans le bâtiment neuf tout comme dans le bâtiment existant. Un beau rôle pour les consultants :
- Consolider les cadres de référence d’un label en illustrant chacune des avancées.
- Aider les acteurs, promoteurs, propriétaires, partenaires, usagers… à appréhender les capacités intellectuelles d’un bâtiment !
Alors le label sera plébiscité par l’usager !
Pascal Lancelot
Lancelot Consulting
Télécharger la Lettre de XMP-Consult n°12 (juillet 2021) en .PDF |
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